Pourquoi avons-nous peur du mot « vagin » ?
On a peur du mot « vagin ».
Peut-être que ce n’est pas le cas pour toi, mais dans le monde, c’est un mot qui met beaucoup de gens mal à l’aise. Même s'il s'agit du terme médical approprié pour désigner un organe que possède plus de 50 % de la population mondiale, « vagin » est l'un des mots les plus censurés de la langue anglaise. Tu as du mal à y croire ? Une étude du Center for Intimacy Justice a révélé que de nombreuses annonces, même dans le domaine de la santé, contenant les mots « vagin », « vaginal » ou « santé vaginale » sont systématiquement censurées par les grandes plateformes de médias sociaux.
Une autre étude a analysé la censure contemporaine de ce mot à travers plusieurs supports, comme la presse écrite, la radio, la télévision et le cinéma. Les résultats sont accablants : des publicités ont été bloquées, des émissions de télévision (y compris Grey's Anatomy !) ont été éditées, des titres de livres ont été modifiés, et même des étudiants ont été suspendus, tout ça parce qu’ils ont osé dire « vagin ».
Dans la culture d'aujourd'hui, le mot « vagin » est devenu un terme qu'on évite. Il est temps de changer cela.
Une longue histoire de censure
Les étymologistes ont découvert que le mot « pénis » est utilisé pour désigner les organes génitaux masculins depuis 1610. Quant au mot « vagin » ? Il n’a été utilisé comme terme médical pour désigner les organes génitaux féminins qu'environ 70 ans plus tard. Ce terme vient du latin et signifie à l'origine « fourreau », comme le « fourreau d’une épée ». Et cette épée, tu t’en doutes, symbolise le pénis.
Si tu trouves déjà troublant que même le langage pour désigner le vagin soit centré autour de la masculinité et de l’hétéronormativité, tu n’es pas le seul à penser ainsi.
Avant l’apparition du mot « vagin », le langage autour de l’anatomie féminine était soit vulgaire, soit inexistant. On évitait d’en parler, ce qui contribuait à une culture de silence autour des questions de santé féminine.
Pourquoi la censure du mot « vagin » est problématique
Les mots ont du pouvoir. En refusant de nommer une partie du corps, on envoie le message que cette partie du corps est source de honte. Cette honte non dite peut avoir des conséquences graves, en particulier dans le domaine de la santé.
Si une partie de ton corps est considérée comme embarrassante, quelque chose dont on ne peut même pas parler librement, comment peux-tu en discuter ouvertement lors de visites médicales ? Comment peux-tu exprimer tes préoccupations ou consulter ton médecin pour des questions liées à cette partie du corps ?
Cela crée un problème à grande échelle : une méta-analyse a révélé qu’il y a beaucoup moins d’études financées autour de la vulve, du vagin et du système reproducteur féminin, même pour des maladies aussi graves que le cancer. Notre attitude de « hush-hush » envers les vagins nous maintient dans l’ignorance.
Dans une interview pour Salon Magazine, la célèbre urologue Dr. Rachel Rubin a déclaré : « Plus nous pourrons clarifier le langage et normaliser [cette anatomie], et plus de gens pourront se défendre eux-mêmes ».
Les spécialistes de la prévention des abus ont théorisé que décrire le vagin (et les autres parties génitales) avec des termes clairs dès le plus jeune âge permet aux enfants de se sentir à l’aise pour communiquer de manière précise et honnête au sujet de leur corps. La revue The Atlantic a rapporté que les « cultures de silence » permettent aux auteurs de violences sexuelles sur des enfants de rester cachés, et poussent les victimes à garder le silence.
Le vagin est une partie du corps, pas un sujet tabou. Et lorsqu’on évite de le nommer comme il se doit, toute cette région devient un sujet mystérieux et interdit. Avec moins de la moitié des élèves américains recevant une éducation suffisante sur les systèmes reproducteurs, refuser d’appeler le vagin par son nom est tout simplement contre-productif. Si nous n’en parlons pas franchement dans les écoles, et nulle part ailleurs… Comment espérer que quelque chose change ?
Les pires surnoms pour « vagin »
Passons un moment à examiner les pires expressions que les gens utilisent pour éviter de dire « vagin » :
- Bajingo : ça fait penser à « banjo »… un instrument, pas un organe.
- Minky : un nom pour un hamster, pas pour des organes génitaux.
- Foof : un mot étrange qui ne veut rien dire.
- Vajeen : ça ressemble plus à un fromage mou qu’à autre chose.
- Flower : poétique, mais inutile.
- Front bottom : très confus, et certainement pas utile.
- Flange : juste… non.
Aucun de ces termes ne transmet le respect et la compréhension que cette partie du corps mérite.
Réclamer le mot « vagin »
Prêt à dire « vagin » sans rougir ? Voici comment faire :
1. Utilise « vagin » aussi souvent que possible
Arrête d’utiliser des euphémismes flous pour un mot qui doit être normalisé. C’est l’heure de l’accepter fièrement.
2. Apprends à mieux connaître ton vagin
Prends le temps d’observer ton anatomie, avec un miroir si nécessaire. Te familiariser avec ton corps peut aider à combattre la honte associée.
3. Libère les autres de ce tabou
Explique à tes amis et proches l’importance d’utiliser le bon terme et partage ce que tu as appris sur les effets du langage stigmatisant. Encourage-les à célébrer et apprécier cette incroyable partie du corps.
En disant « vagin » sans hésiter, nous pouvons commencer à démanteler la stigmatisation et à promouvoir une culture d’ouverture, d’éducation, et d’autonomisation.