Ras-le-Bol du Mauvais Accès aux Soins pour les Femmes
Pendant ma première année de master, j’ai souffert d’une anorexie sévère. Mes cheveux tombaient, ma tension artérielle était dangereusement basse et, surtout, je n’avais pas eu mes règles depuis presque un an. Un matin, après avoir failli m’évanouir en essayant de me lever, je suis allée dans un centre de santé local. Je ne pouvais plus me faire ça j'avais besoin d'aide.
Mon médecin m’a félicitée pour ma perte de poids. Lorsque j’ai expliqué que je ne mangeais pas et que j’étais inquiète de ne plus avoir mes règles, il m’a dit que j’étais probablement enceinte. J'ai répondu que c'était impossible, n'ayant pas été active sexuellement depuis trois ans. Il a ri, m’a tapoté le genou et m’a dit que je n’étais pas obligée de lui dire la vérité.
Je suis partie découragée, et un peu insultée. Est-ce que j’exagère ? Est-ce que tout va bien en fait ?
Après quelques recherches à la maison, j’ai découvert que mon anorexie avait provoqué une aménorrhée hypothalamique, l’absence de menstruation causée par des restrictions. Mon corps se mettait en mode survie, coupant toutes fonctions non essentielles, y compris mon système reproducteur. Onze mois plus tard, en rémission, un autre médecin m'a informée que j'avais échappé de peu à des problèmes cardiaques et reproductifs irréversibles.
Mon premier médecin ne m’a pas écoutée, il m’a même accusée de mentir. Comme femme, et surtout comme femme noire, je savais que mes chances d’être prise au sérieux dans une situation d’urgence médicale étaient faibles.
Des anecdotes comme celle-ci sont courantes chez les femmes, et illustrent bien une réalité : quelque chose ne va pas du tout dans les soins de santé des femmes. Voici quelques données clés qui mettent en lumière les raisons de cette situation.
Trop de médecins n’écoutent pas les femmes.
Selon la Fondation Kaiser, près de 50 % des femmes âgées de 18 à 35 ans ont vécu une expérience négative avec un professionnel de santé. Parmi toutes les femmes interrogées, 20 % ont déclaré que leur médecin avait fait des suppositions sans poser de questions, et 15 % ont dit que leur médecin les avait accusées de ne pas dire la vérité sur leur santé.
Des études montrent que l'autodéfense est cruciale pour tout patient, mais pour les femmes, la tâche est bien plus ardue. Le stigmate de l'hystérie féminine persiste. Diagnostique populaire au 19ème siècle pour les femmes présentant des comportements jugés « indésirables », l’idée de femmes "hystériques" reste ancrée dans notre société.
Le biais dans la perception de la douleur est réel, surtout pour les femmes noires et de couleur.
« Ça ne peut pas être si terrible ! » est une phrase que beaucoup de femmes connaissent. En moyenne, les femmes attendent 15 minutes de plus que les hommes aux urgences pour des symptômes similaires. Lorsqu’elles expriment leur douleur, on leur prescrit davantage de sédatifs ou d’anxiolytiques que d’analgésiques.
Ce phénomène est appelé biais de la douleur, et il est extrêmement dangereux. Minimiser la douleur des femmes empêche de diagnostiquer à temps des événements critiques comme des crises cardiaques ou AVC. Ce problème est encore plus prononcé pour les femmes noires. Une étude de 2016 a révélé que les patients noirs sont « systématiquement sous-traités pour la douleur ». Ainsi, les femmes noires sont souvent ignorées, peu importe leur notoriété : Serena Williams en est un exemple emblématique.
Les soins de santé pour les femmes sont sous-financés.
Si les financements médicaux reflètent nos priorités, alors la santé des femmes n’est clairement pas une priorité. Les recherches montrent que les maladies touchant les hommes reçoivent bien plus de financement que celles touchant les femmes. De plus, les chercheuses cliniques reçoivent 26,7 % moins de subventions que leurs homologues masculins, et les femmes qui travaillent dans le secteur de la santé sont souvent cantonnées à des rôles de non-médecins, avec des salaires inférieurs.
Face à cette situation, il est facile de se sentir impuissante, et en tant que patiente, ce n’est pas (et ne sera jamais) votre responsabilité de réparer un système défaillant. Cependant, voici quelques conseils pour faciliter votre prochaine consultation :
- Si possible, trouvez un professionnel de santé qui soutient les femmes et partage vos valeurs. Si vous êtes une femme de couleur, envisagez d’en trouver un qui partage votre identité.
- Documentez tout ce qui concerne vos rendez-vous médicaux.
- Faites-vous entendre et corrigez les suppositions vous connaissez votre corps mieux que quiconque.
- N’ayez pas peur de demander un deuxième (voire un troisième !) avis.
Il est important que chaque voix de femme soit entendue.
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